Le 19 Janvier 2017 pour la cinquième fois la France était condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) pour violation du droit au respect de la vie privée des enfants prévu par l’article 8 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales . Elle avait refusé de transcrire les actes de naissance d’enfants nés d’une gestation pour autrui à l’étranger.
La gestation pour autrui, interdite en France s’inscrit dans l’étude plus large des méthodes de procréation médicalement assistée qui posent des problèmes de société, juridiques et politiques. Elles sont légalisées depuis les lois bioéthiques du 29 juillet 1994 modifiées par loi du 7 juillet 2011 .
En France, en 2010, 22 401 enfants étaient nés grâce à une assistance médicale à la procréation, ce qui représente 2,7 % des naissances (ou une naissance sur 40). Chaque année encore c’est 25 à 30 000 couples qui sont adressés à un centre de procréation médicalement assistée
« Un enfant pour tous» aujourd’hui est-ce possible en France, et quelle est la législation ?
Pour commencer une clarification est nécessaire :
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PMA, AMP, GPA, que signifient ces mots?
- L’AMP « Assistance médicale à la procréation » regroupe l’ensemble des pratiques cliniques et biologiques régi par la loi française. Elle a pour objet de remédier à l’infertilité pathologique d’un couple ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie.
- Elle est ouverte aux couples hétérosexuels en âge de procréer (article L2141-2 du Code de la santé publique). Elle ne pourra donc jamais concerner un couple homosexuel, même au nom de l’égalité des droits », puisque l’incapacité d’avoir des enfants d’un couple homosexuel n’est pas pathologique mais liée à la biologie, à la nature sexuée de la reproduction humaine ».
- La PMA « Procréation médicalement assistée » était une expression utilisée autrefois pour désigner ce que l’on appelle aujourd’hui l’assistance médicale à la procréation. La confusion des termes dans le public continue aujourd’hui. Mais en réalité la PMA est plus large et « crée un nouveau mode de reproduction afin de dépasser la biologie humaine ». Elle pourrait aussi bien concerner les couples hétérosexuels qui ne sont plus en âge de procréer que les couples homosexuels ou les femmes célibataires
- La GPA « gestation pour autrui » est une technique de procréation médicalement assistée (PMA) utilisée dans les cas où la femme ne peut porter son bébé au cours d’une grossesse. Une mère porteuse le fera pour elle. Elle est comme on le verra interdite en France, mais possible dans certains pays.
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Quelles règles s’appliquent à l’ASSISTANCE MEDICALE A LA PROCRÉATION. (AMP) ?
L’ASSISTANCE MEDICALE A LA PROCREATION. (AMP) désigne l’ensemble des pratiques cliniques et biologiques (dont la liste est fixée par un arrêté du Ministère chargé de la santé) permettant :
- La conception in vitro ;
- La conservation des gamètes (ovocytes et spermatozoïdes), des tissus germinaux (testiculaire et ovariens, ce qui inclut la technique de la congélation ultra-rapide des ovocytes, explicitement autorisée) et des embryons ;
- Le transfert d’embryons ;
- L’insémination artificielle.
Cette définition, issue de la loi du 7 juillet 2011, modifie ainsi l’article L.2141-1 du Code de la santé publique qui donnait une définition plus floue.
Différents traitements sont donc possibles, mais toutes dérivent en fait des deux techniques de base :
- L’insémination artificielle : elle consiste à déposer dans la cavité utérine le sperme préparé en laboratoire. La fécondation a lieu de façon naturelle dans l’appareil reproducteur de la femme.
- La fécondation in vitro : les ovules sont prélevés grâce à une ponction folliculaire et sont fécondés ensuite en laboratoire au contact des spermatozoïdes. Une fois l’ovule fécondé, le zygote (cellule non divisée) se forme. C’est après la division cellulaire que l’on obtient l’embryon, qui sera transféré à l’utérus de la patiente.
Ces techniques, répondent à la demande parentale d’un couple, elles ont pour objet de remédier à l’infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité.
Sous certaines conditions ces techniques sont donc autorisées en France. Mais il est d’autre méthode de procréation médicalement assistées qui sont interdite d’interdite par la loi française dont la principale est la gestation pour autrui (GPA).
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Qu’est-ce que la GESTATION POUR AUTRUI ?
C’est une technique de procréation médicalement assistée (PMA) utilisée dans les cas où la femme ne peut porter son bébé au cours d’une grossesse.
MEDICALEMENT, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français définit la GPA comme « l’implantation dans l’utérus d’une femme désignée sous le nom de « mère porteuse » ou de « testatrice » d’un embryon issu de la fécondation in vitro d’un ovocyte d’une femme n’ayant pas d’utérus ou pas d’utérus fonctionnel (du fait d’une malformation congénitale ou d’une hystérectomie) par les spermatozoïdes de son conjoint ». Cette définition exclut donc les gestations pour autrui avec recours au don d’ovocyte, de sperme ou d’embryon et les cas où l’ovocyte provient de la mère porteuse.
JURIDIQUEMENT, la gestation pour autrui (ou pratique dite de la « maternité de substitution ») est une pratique consistant à obtenir d’une femme, parfois appelée « mère-porteuse », gratuitement ou contre rémunération, qu’elle porte un enfant pour le compte d’une autre, en s’engageant à l’abandonner à la naissance pour permettre au couple receveur de l’enfant de faire établir un lien de filiation à son égard (Dictionnaire des termes juridiques).
La définition médicale est donc beaucoup plus technique que la définition juridique.
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Quelles sont les positions des Etats étrangers sur ces méthodes ?
En résumé pas de règles communes, et pas de tendances précises.
Chaque pays a sa position ce qui ne facilite pas les choses.
- La position de la Cour Européenne n’est pas véritablement tranchée non plus. Il convient de citer une décision du 3 novembre 2011 « SH et autres c/ Autriche », dans laquelle elle constate un consensus parmi les 47 Etats contractants à la Convention EDH qui autorise le don de gamètes, et laisse une grande marge d’appréciation à ces derniers.
- Dans certains Etats, le recours à la PMA est plus souple. Ainsi, la condition d’âge est exclue au Royaume-Uni et en Espagne. L’anonymat n’est pas requis pour un don de gamètes en Belgique : un ami ou un membre de la famille peut offrir ses gamètes aux époux.
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La PMA à l’étranger
- Aux Etats-Unis le don de gamètes n’est ni anonyme, ni gratuit. D’ailleurs, les époux peuvent choisir qui sera le donneur et donc ils prédéterminent indirectement la personnalité de leur enfant. Dès lors, les gamètes se marchandent à des sommes très importantes en fonction de l’apparence physique du donneur ou de ses capacités intellectuelles.
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La GPA à l’étranger
- Ainsi, il existe des Etats qui l’autorisent, d’autres qui l’interdisent et d’autres qui n’ont pas une législation suffisamment établie sur le sujet et qui donc la tolèrent.
- Par exemple, la GPA est autorisée et encadrée dans certains États des États-Unis (comme la Californie) et du Canada, en Inde, en Ukraine, en Israël, en Afrique du Sud, en Argentine ou au Brésil.
- En Europe, elle est autorisée en Belgique, aux Pays-Bas, et en Pologne. Elle est autorisée mais encadrée légalement au Royaume-Unis et en Roumanie. En revanche, elle est prohibée en Allemagne, en Autriche, en Italie, en Espagne ou encore au Portugal.
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Quelle est la position du droit français pour recourir à l’AMP ?
Le droit français autorise à l’AMP (et interdit la gestation pour autrui).
La question est essentiellement traitée par le Code civil et le Code de la santé publique.
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Quelles sont les conditions légales pour l’AMP?
Le Code de la santé public prévoit certaines conditions strictes :
- Elle doit avoir pour objet de remédier à l’infertilité d’un couple ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité. Le caractère pathologique de l’infertilité doit être médicalement diagnostiqué (art L. 2141-2 CSP) ;
- Elle s’adresse aux couples hétérosexuels mariés, pacsés ou en concubinage (art L. 2141-2 CSP). Donc sont exclus les couples homosexuels (le Conseil constitutionnel a rendu une décision très importante en la matière le 17 mai 2013) ou les personnes célibataires.
- Les partenaires doivent être consentants (art L. 2141-2 CSP). Le consentement des deux époux doit être obtenu de manière expresse, préalablement à la AMP ;
- En âge de procréer (art L. 2141-2 CSP). La loi ne précise pas l’âge exact, les laboratoires sont juges de l’espèce. Toutefois, il est évident que les époux doivent être âgés de 18 à 50 ans maximum ;
- Le couple devra passer des entretiens médicaux devant les membres de l’équipe médicale clinicobiologique pour juger de sa motivation et de sa stabilité (art L.2141-10 CSP).
- Le décès d’un époux, la révocation du consentement, l’introduction d’une requête en divorce ou d’une séparation de corps, ou la simple séparation de fait sont des obstacles qui annule une procédure de PMA. Le consentement est aussi privé d’effet lorsque l’homme ou la femme le révoque, par écrit auprès d’un médecin (art 311-20 Code civil).
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Quelles sont les conditions particulières en cas de recours à un tiers donneur ?
Dans l’hypothèse où le couple a recours à un don de gamètes, les conditions sont renforcées, il faut que :
- Les couples receveurs doivent préalablement donner, dans des conditions garantissant le secret, leur consentement au juge ou au notaire, qui les informe des conséquences de leur acte au regard de la filiation. (art 311-20 Code civil) ;
Celui qui, après avoir consenti à l’assistance médicale à la procréation, ne reconnaît pas l’enfant qui en est issu engage sa responsabilité envers la mère et envers l’enfant.
- L‘anonymat (art 16-8 Code civil) et la gratuité (art 16-6 Code civil). Les receveurs ne connaissent pas le donneur. D’ailleurs, toute transaction financière relative à un don de gamètes est formellement interdite;
- Les gamètes de l’un des époux : le double don de gamètes est prohibé, l’un au moins des époux, ou concubin doit participer biologiquement à l’AMP (art 2141-3 CSP).
- Dans ce cas-là, c’est la femme issue du couple qui donnera naissance à l’enfant. Ceci est important à préciser car lorsque la mère porteuse est une tierce personne, il s’agit de la GPA qui est interdite en France.
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Quelle est la position française sur la GPA ?
En France, la consécration légale de l’interdiction de la GPA est finalement assez récente puisque ce sont les lois de bioéthique du 29 juillet 1994 qui, introduisent dans le Code civil les principes généraux de protection de la personne humaine.Elle réaffirmait la jurisprudence de la Cour de cassation qui s’était déjà prononcée sur le sujet, dans un arrêt du 31 mai 1991, en interdisant la pratique au nom du principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain qu’à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes ».
En 2008 pourtant un groupe de travail au Sénat s’était positionné en faveur de la GPA mais à la condition d’une réglementation stricte l’encadrant pour lutter contre l’infertilité.
Mais le Conseil d’Etat par deux avis le 6 mai 2009, et le 12 décembre 2014, s’y est opposé.
Dans la matière juridique, les questions sur la GPA trouvent un écho à la fois en droit civil et en droit pénal. Il convient alors d’étudier ces deux aspects.
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Le droit civil et la GPA
Il existe dans le Code civil un chapitre intitulé « Du respect du corps humain ». et qui affirment le principe de non « patrimonialité » du corps humain :
- L’article 16-1 du Code civil « Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial » ;
- L’article 16-5 du Code civil « Les conventions ayant pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont nulles » ;
- L’article 16-6 du code civil « Aucune rémunération ne peut être allouée à celui qui se prête à une expérimentation sur sa personne, au prélèvement d’éléments de son corps ou à la collecte de produits de celui-ci » ;
- L’article 16-7 du code civil « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle. ».
- L’article 16-8 du code civil « Les dispositions du présent chapitre sont d’ordre public ».
En pratique donc le corps humain et tout ce qu’il peut produire ne peut pas être vendu. Appliqué à la GPA, cela signifie qu’un couple ne peut pas « acheter » l’enfant d’une autre femme, même si cette dernière est consentante !
Les juges français sanctionnent par la nullité d’ordre public des contrats portant sur la GPA. (Cour de Cassation première Chambre civile du 6 avril 2011)
En résumé :
– Les conventions portant sur la gestation pour le compte d’une personne autre que la mère qui donnera naissance à l’enfant sont interdites
-Il importe peu que la pratique soit légale à l’étranger ;
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Le droit pénal et la GPA
Si le Code civil dispose de grands principes fondamentaux de notre droit, le Code pénal donne une sanction au non-respect de ces principes.
Ainsi, l’article 227-12 du Code Pénal sanctionne « le fait de provoquer soit dans un but lucratif, soit par don, promesse, menace ou abus d’autorité, les parents ou l’un d’entre eux à abandonner un enfant né ou à naître ».
La loi de bioéthique de 1994 a rajouté un deuxième alinéa à cet article 227-12 introduit en sanctionnant « le fait de s’entremettre entre une personne ou un couple désireux d’accueillir une enfant et une femme acceptant de porter en elle cet enfant en vue de leur remettre ». La sanction prévue dans ce cas est d’un an d’emprisonnement et 15 000€ d’amende, et sera doublée si le but est lucratif ou si la médiation s’est produite de façon habituelle.
Le Code pénal est plus sévère envers les professionnels qui pratiquent la GPA, qu’à l’égard de la mère porteuse ou des parents d’intention. L’article 511-24 du Code Pénal qui prévoit cette répression particulière en punissant de 5 ans d’emprisonnement et 75 000€ d’amende « Le fait de procéder à des activités d’assistance médicale à la procréation à des fins autres que celles définies à l’article L. 2141-2 du code de la santé publique », ce qui renvoie à la gestation pour autrui.
En France, le contrat de GPA est doublement sanctionné :
-Civilement par la nullité de l’accord de gestation de substitution
-Pénalement avec une peine pouvant aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75000€ d’amende
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QUEL EST LE SORT JURIDIQUE DES ENFANTS NEES PAR AMP. ?
Les conséquences principales portent essentiellement sur la filiation.
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Les effets sur la filiation
Il convient de distinguer la filiation à l’égard du couple, et celle à l’égard de l’éventuel donneur.
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La filiation à l’égard du couple
L’enfant né par AMP bénéficie des mêmes règles d’établissement de la filiation que l’enfant né naturellement. (cf. l’article 310-1 du Code civil) et notamment
- La filiation est établie, à l’égard de la mère, par la désignation de celle-ci dans l’acte de naissance de l’enfant. (art 311-25 Code civil) ;
- Les règles sur la reconnaissance de paternité:Si le couple est marié, l’époux est présumé être le père et il est donc désigné comme tel dans l’acte de naissance (art 312 Code civil) ;Si le couple est pacsé ou en union libre, le père doit reconnaître l’enfant en faisant une déclaration à l’état civil (art 316 Code civil).
- MAIS ATTENTION car contrairement au lien de filiation établi suite à une procréation naturelle, le lien de filiation établi suite à une PMA est incontestable. L’alinéa 2 de l’article 311-20 dispose que « Le consentement donné à une procréation médicalement assistée interdit toute action aux fins d’établissement ou de contestation de la filiation à moins qu’il ne soit soutenu que l’enfant n’est pas issu de la procréation médicalement assistée ou que le consentement a été privé d’effet ».
- De plus, celui qui ne reconnait pas l’enfant issu de la PMA, alors qu’il avait consenti à cette mesure, engage sa responsabilité civile envers ma mère et l’enfant (art 311-20, alinéa 4).
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La filiation à l’égard du donateur
Lorsque la PMA fait intervenir un tiers donneur, via un don de gamètes, aucun lien de filiation ne peut être établi à son égard (art 311-19 Code civil).
Le consentement du tiers donneur à la procréation médicalement assistée, passé devant un notaire ou un juge, vaut abandon anticipé de toute action en reconnaissance de paternité/maternité.
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QU’EN EST-IL DE L’ADOPTION POUR UN COUPLE HOMOSEXUEL D’UN ENFANT NE SOUS AMP?
Petit rappel, en France, l’AMP n’est réservée qu’aux couples hétérosexuels mariés, pacsés ou en concubinage pouvant apporter la preuve d’une vie commune, dont l’infertilité a été médicalement diagnostiquée ou dont le processus de procréation naturelle pourrait transmettre à l’enfant ou à un membre du couple une maladie d’une particulière gravité, type VIH (art L. 2141-2 CSP).
Face à cette situation, les couples homosexuels lesbiens désireux de bénéficier de ces techniques doivent donc se rendre à l’étranger mais cela constitue une fraude à la loi
Or, la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples homosexuels a changé les choses. En effet, il est désormais légal pour un couple homosexuel marié, que l’un d’entre eux adopte l’enfant de son conjoint. Cependant, la loi n’apporte aucune précision concernant le mode de conception de l’enfant. C’est ainsi que la Cour de cassation s’est prononcée sur la question de savoir si l’adoption l’enfant de son conjoint, issu d’une PMA à l’étranger peut être considérée comme une fraude.
C’est la question à laquelle la Cour de cassation a dû répondre dans ses avis du 23 septembre 2014. En l’occurrence, dans deux avis du 22 septembre 2014, la Cour de cassation a considéré que « le recours à la procréation médicalement assistée ne fait pas obstacle à l’adoption de l’enfant du parent biologique par son conjoint de même sexe dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant ».
Donc aujourd’hui l’adoption de l’enfant de son épouse est possible dans les couples homosexuels.
QUEL EST LE SORT JURIDIQUE DES ENFANTS NÉS PAR GPA ?
En 2014, le nombre d’enfants issus de GPA vivant en France était estimé à 1 000, appelés les « fantômes de la république » a une époque où aucune reconnaissance n’était possible. Aujourd’hui les choses évoluent
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La nationalité de l’enfant
L’article 18 du Code civil dispose qu’« est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français ».
Le Conseil d’Etat, dans son avis du 12 décembre 2014, validant une circulaire , l’ancienne Garde des Sceaux, Christiane Taubira, du 25 janvier 2013 estime que le fait qu’un enfant soit né à l’étranger par une pratique interdite en France ne justifie pas de le priver de sa nationalité, à partir du moment où sa filiation avec un parent français a été légalement établie à l’étranger.
Concrètement, ce raisonnement du Conseil d’Etat autorise donc la délivrance d’un certificat de nationalité, qui permet de doter l’enfant de papiers d’identité français sans passer par une transcription à l’état civil national de la filiation établie à l’étranger.
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La reconnaissance de la filiation
Pour rappel, la filiation est le lien juridique entre parents et enfants.
- L’évolution jurisprudentielle
Jusqu’en 2015, la France interdisait toute filiation découlant d’une GPA légalement pratiquée à l’étranger. Elle justifiait son refus de transcrire l’état civil étranger par la considération de la fraude à la loi en considérant que puisque la GPA étant interdite en France, la naissance en constituait l’aboutissement.
Mais suite à sa condamnation par la Cour Européenne des Droits de l’Homme en juin 2014 (précédemment évoquée), la France a changé de position sur le sujet.
La Cour de cassation s’est déjà prononcée en sa forme la plus solennelle sur le sujet. Le 3 juillet 2015, l’assemblée plénière de la Cour de cassation a jugé qu’« en présence d’un acte de naissance qui n’est ni irrégulier, ni falsifié, et les faits déclarés correspondant à la réalité, la convention de gestation pour autrui conclue entre le père de l’enfant et la mère porteuse ne fait pas obstacle à la transcription de l’acte de naissance ».
Dès lors, en l’état actuel du droit français, la filiation avec le parent biologique de l’enfant né par GPA à l’étranger doit être reconnue légalement.
Mais la Cour européenne reconnaît à la France le droit d’interdire et de punir la GPA sur son territoire.
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Les difficultés de la position française
Toutefois, des problèmes subsistent encore dans la mesure où la transcription n’est que partielle, la France ne reconnait la filiation qu’à l’égard du parent biologique c’est-à-dire pour le membre du couple qui a donné ses gamètes.
Mais alors deux situations peuvent poser problème au regard du droit français :
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Que faire lorsque la mère porteuse (mère biologique) ne souhaite pas renoncer à la filiation de l’enfant?
- En droit français, la seule mère admise est la mère qui accouche, donc la mère porteuse. Si le problème se pose le droit français ne devrait pas défendre le parent d’intention.
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Comment faire pour établir la filiation avec le parent d’intention qui n’a pas apporté ses gamètes ?
Il n’entretient aucun lien biologique avec l’enfant et de ce fait, la filiation ne devrait pas pouvoir être établie à son égard en droit français.
Cette position française a été validé par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, de manière indirecte par un arrêt du 24 janvier 2017 « Paradiso et Campanelli c/ Italie ». Dans cette décision, les juges européens ont jugé qu’« en l’absence de tout lien biologique, l’Etat n’est pas obligé de reconnaître une filiation légale pour les couples ayant recouru à la GPA. ».
Une solution peut être envisageable pour le parent non biologique : le recours à l’adoption. Ce dernier pourrait adopter l’enfant par le conjoint homosexuel ou la conjointe du père biologique. Mais ce n’est pas encore gagné…
La Cour de cassation s’y était déjà opposée en arguant le détournement de l’institution de l’adoption (arrêt du 31 mai 1991 par la suite dans un arrêt du 9 décembre 2003
D’ailleurs, le 24 mars 2016, la Cour d’appel de Dijon s’est également opposée à l’adoption de l’enfant né d’une GPA à l’étranger par l’époux du père biologique mais sur un fondement juridique différent de celui de la Cour de cassation. Elle a considéré que la violation du principe de prohibition de la GPA ne conduit pas nécessairement au rejet de la demande d’adoption formulée par le parent d’intention lorsqu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant. Il convient d’opérer un contrôle de proportionnalité entre l’atteinte à l’intérêt de l’enfant résultant du rejet de la demande d’adoption, d’une part, et la violation du principe d’ordre public de la prohibition de la gestation pour autrui, d’autre part.
En l’espèce, les juges du fond ont refusé la demande d’adoption au motif que l’absence de filiation entre l’enfant et le parent d’intention « ne porte pas sérieusement atteinte ni à son intérêt entendu de façon générale ni à ses droits protégés » puisque l’enfant bénéficie déjà d’une filiation paternelle biologique.
Cette décision mérite rapprochée des deux avis rendus par la Cour de cassation du 22 septembre 2014. Dans ces avis elle préconise d’autoriser l’adoption de l’enfant né d’une PMA à l’étranger par l’épouse de la mère lorsque les conditions de l’adoption sont remplies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant. Elle ne soumet nullement la demande à un quelconque contrôle de proportionnalité. Toutefois ces avis portent sur la PMA en général et non pas particulièrement sur la GPA.
Pour des auteurs, la Cour de Cassation devra se prononcer et se sera peut-être une « révolution » soit elle:
- autorise l’adoption au nom du droit au respect de la vie privée et familiale et de l’intérêt de l’enfant. « Dans ce cas, elle mettra indirectement fin à la prohibition de la gestation pour autrui».
- Soit elle refuse « elle créera une nouvelle discrimination, contraire aux articles 6 de la DDH et 14 de la Conv. EDH, fondée sur le mode de conception de l’enfant entre les couples homosexuels. L’enfant né d’une PMA à l’étranger peut être adopté par l’épouse de la mère quand l’enfant né d’une GPA à l’étranger ne peut pas être adopté par le conjoint du père. Elle tentera, dans ce dernier cas, de justifier la discrimination par le fait que la prohibition de la GPA est d’ordre public quand l’encadrement de la PMA ne l’est pas ».
Il y a encore des efforts à faire pour trouver des solutions sereines ; Mais la GPA pose encore des problèmes éthiques que tous ne sont pas prêts à surmonter.L’avenir dira ce qu’il en est mais l’uniformisation des solutions du moins dans les pays européens serait déjà une bonne chose
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