ACCIDENT DE LA CIRCULATION MODE D’EMPLOI Volet 2 : L’indemnisation des victimes: La procédure amiable

 

Avec la  loi n°85-677 du 5 juillet 1985 ou loi Badinter, le législateur prévoyait pour la première fois un « droit à indemnisation » pour toute victime d’un accident de la circulation dans lequel était impliqué un véhicule terrestre à moteur.

Après les principes et la mise en œuvre des responsabilités en cas d’accident de la circulation voici le second volet cette fois sur l’indemnisation des victimes.

Elle peut intervenir de façon amiable avec les assurances qui proposeront en fonction du préjudice subi une indemnisation. A défaut d’accord elle sera octroyée par les juridictions.

La « procédure » amiable d’indemnisation, reste pourtant un parcours difficile où il est préférable, bien souvent d’être assisté d’un avocat et d’un médecin.

 LES ÉTAPES DE LA PROCÉDURE AMIABLE d’INDEMNISATION

◊ ÉTAPE 1 : Comment faire  sa déclaration auprès de son assurance ?

Il faut déclarer l’événement dans les 5 jours qui suivent l’accident auprès de son assurance.

Pour tous préjudices corporels il faut fournir les pièces suivantes :

  • Le certificat initial médical et les certificats médicaux suivants déjà rédigés
  • L’avis d’arrêt de travail accompagné et ses prolongations avec une lettre explicative sur les dommages subis,
  • Voire un exemplaire du constat amiable

En cas de préjudices matériels : il est nécessaire de décrire les atteintes aux biens.

A côté de ces documents, il convient de transmettre les renseignements civils, professionnels et sociaux de la victime.

 

◊ ÉTAPE 2 : Quelles informations doit communiquer l’assurance ?

Lors de la première correspondance avec la victime, l’assureur doit préciser qu’elle peut :

  • obtenir la copie du procès-verbal d’enquête de police ou de gendarmerie,
  • se faire assister par un avocat
  • se faire assister par le médecin de son choix en cas d’examen médical

Elle ouvre un dossier  et sollicite tous les éléments qui peuvent être utiles

 

ÉTAPE 3 : L’EXPERTISE MÉDICALE AMIABLE : est-elle obligatoire ?

L’assurance peut imposer une expertise médicale lorsque les dommages sont conséquents.

La victime doit être prévenue, 15 jours à l’avance, de la date et du lieu d’examen. Elle peut se faire assister par un médecin de son choix mais aussi récuser le médecin choisi par l’assureur.  

Une fois l’examen passé, l’assurance doit transmettre à la victime dans un délai de 20 jours une copie du rapport d’expertise.

ProcedureL’article R211-43 du Code des assurances dispose « qu’en cas d’examen médical pratiqué en vue de l’offre d’indemnité, l’assureur ou son mandataire avise la victime, 15 jours avant l’examen, de l’identité et des titres du médecin chargé d’y procéder, de l’objet, de la date et du lieu de l’examen, ainsi que le nom de l’assureur pour le nom duquel il est fait. Il informe en même temps la victime qu’elle peut se faire assister d’un médecin de son choix ».

 

ÉTAPE 4 : L’OFFRE INDEMNITÉ ?

Quelle assurance doit la proposer ? 

Si un seul véhicule est impliqué dans l’accident, l’offre est faite par l’assureur de ce véhicule. Mais si plusieurs véhicules sont impliqués dans l’accident, et s’il y a plusieurs assureurs, l’offre est faite par l’assureur mandaté par les autres.

Dans quel délai l’offre est-elle faite ?

A – Délai pour l ‘Offre d’indemnisation à titre provisionnel : Avant l’offre définitive, une offre de provision peut être faite lorsque l’état de la victime n’est pas consolidé.  La consolidation est le moment où l’état de la victime n’est plus évolutif et n’est plus susceptible d’être amélioré d’une façon appréciable et rapide par un traitement médical approprié.  Dès lors que l’assureur aura été informé de la consolidation de l’état de santé de la victime, une offre définitive doit être présentée dans un délai de 5 mois.

B –Délai pour l’Offre définitive : Deux délais sont distingués : 

  • Dans les 3 mois qui suivent la déclaration de l’accident, l’assurance a l’obligation de présenter une offre d’indemnisation, quel que soit la nature du dommage. Pour cela, il faut que la responsabilité de l’auteur soit incontestable et que le dommage soit quantifié. En cas de complication du dossier le délai peut être prolongé jusqu’à 8 mois à compter de l’accident. Par exemple, le refus de se soumettre à l’expertise médicale peut faire prolonger le délai.
    ProcedureL’article 12 de la loi Badinter dispose que « l’assureur qui garantit la responsabilité du fait d’un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter dans un délai maximum de huit mois à compter de l’accident une offre d’indemnité à la victime qui a subi une atteinte à sa personne. Une offre doit être faite aux victimes dans un délai de huit mois à compter de leur demande d’indemnisation».

     Si l’assureur n’est pas avisé de l’accident de la circulation dans le mois de l’accident, le délai normalement prévu est prolongé.

C – Sanction du non-respect des délais : le montant de l’indemnité produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre devenu définitive.Cette sanction s’applique à l’offre de provision et à l’offre définitive.

Que contient l’offre d’indemnisation ?

Elle doit comprendre tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu’ils n’ont pas fait l’objet d’un règlement préalable. En cas d’offre insuffisante, une pénalité est prévue. Le juge peut condamner l’assureur à verser au Fonds de garantie 15% de l’indemnité allouée, sans préjudice des dommages et intérêts dus de ce fait à la victime.

La Cour de cassation peut cumuler cette sanction avec celle de l’offre tardive puisqu’elle assimile l’absence d’offre à une offre insuffisante (Cass, 2e civ, 3 décembre 1997, n° 96-11.046).

N.B : Pour les mineurs et les majeurs en tutelle, l’assureur doit soumettre au juge des tutelles ou au conseil de famille, compétents suivant les cas pour l’autoriser, tout projet de transaction.

Acceptation ou refus de l’offre par la victime ?

La victime dispose de deux options  accepter ou refuser l’offre d’indemnisation:

  • Si la victime accepte l’offre, elle signe une transaction qui peut être dénoncée.

 ProcedureEn effet, l’article 19 de la loi du 5 juillet 1985 dispose que « la victime peut, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dénoncer la transaction dans les 15 jours de sa conclusion ».

Le paiement est effectué dans un délai d’un mois suivant la fin du délai de dénonciation. Le règlement est donc  reçu dans les 45 jours. En cas de retard, des intérêts seront versés.

ProcedureDans le cas contraire, l’article 20 de la loi du 5 juillet 1985 dispose que « les sommes non versées produisent de plein droit intérêt au taux légal majoré de moitié durant deux mois, puis, à l’expiration de ces deux mois, au double du taux légal ».
  • Si la victime refuse l’offre elle peut formuler une autre demande à son assureur ou saisir le tribunal.

La procédure devant les tribunaux fera l’objet d’une autre fiche

 


INDEMNISATION EN QUELQUES NOTIONS 

Les  principes, les différents préjudices, L’indemnisation d’une victime directe ou indirecte 

Quel est le principe de la réparation d’un dommage ?

Le principe est celui de la réparation intégrale du préjudice

ProcedureIl faut « rétablir aussi exactement que possible l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu » Cass, 2e civ, 4 février 1982, n°80-17.139.

Découle de ce principe, celui de l’appréciation in concreto autrement dit évaluer l’indemnisation en fonction du cas de l’espèce.La jurisprudence veille ainsi à ce que les juges n’appliquent pas des forfaits mais En revanche, il est possible de recourir à des méthodes d’évaluation indicatives. 

Deux éléments sont déterminants :

  • l’expertise médicale qui permet d’identifier scientifiquement les préjudices. Une évaluation du potentiel physique est effectuée en pourcentage : de 0 à 100%.
  • Les référentiels indicatifs des indemnisations du préjudice corporel établi par les Cour d’Appel

 

Quels sont les préjudices pris en compte? 

L’indemnisation varie en fonction du préjudice subi.

Il faut distinguer les préjudices matériels et corporels 

  • Les préjudices matériels: sont indemnisés sur justificatifs avec abattement possible pour vétusté notamment Seront couverts les réparations des véhicules endommagés ainsi que la perte ou l’endommagement de tout objet ou vêtement perdus dans l’accident.
  • Les préjudices corporels: Ils recouvrent l’atteinte à l’intégrité physique ou psychique de la personne.

« Un outil » appelé, la nomenclature DINTILHAC, ancien président de la 2eme chambre de la Cour de Cassation et président du groupe de travail constitué pour une réflexion globale en vue d’améliorer les conditions d’indemnisation du préjudice corporel Cette nomenclature a été adoptée en 2004Il référencie les différents types de préjudices et harmoniser les critères d’indemnisation des préjudices suite à un préjudice corporel.

Téléchargez le rapport – octobre 2005 – (format PDF – 449 ko) sur le site du ministère de la justice

Aujourd’hui certaines Cours d’appel produisent des référentiels permettant aux professionnels de connaître les fourchettes d’indemnisations appliquées suivant les tribunaux. L’indemnisation varie suivant la qualité des victimes directes (victimes de l’accident) ou indirectes (exemple les parents d’une victime décédée)

Quels sont les préjudices indemnisés pour LES VICTIMES DIRECTES ?

Les victimes directes peuvent réclamer l’indemnisation de l’ensemble de leurs préjudices tant matériels que corporels

  • Préjudices matériels

Un barème a été établi par les assurances :

  • Si la victime est responsable de l’accident : aucune indemnisation ne pourra être perçue sauf si elle avait souscrit une assurance « tous risques ».
  • Si la victime n’est pas totalement responsable de l’accident : l’indemnisation sera partielle.
  • Si la victime n’est pas responsable de l’accident : l’indemnisation sera totale.

Cependant, dans tous les cas un malus sera appliqué en cas de faute de la victime conducteur.

  • Préjudices corporels

Ils sont scindés entre  préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux et  évalués avant et après consolidation de la victime

Rappel : La consolidation est le momentl’état de la victime n’est plus évolutif et n’est plus susceptible d’être amélioré d’une façon appréciable et rapide par un traitement médical approprié.  

Voici un aperçu des différents préjudices corporels :

1> Préjudices patrimoniaux

Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :

  • penses de santé actuelle : Frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux et pharmaceutiques (infirmiers, kinésithérapie, orthoptie, orthophonie…)
  • Frais divers : tous les frais susceptibles d’être exposés par la victime directe avant la date de consolidation de ses blessures. Exemples : frais de transport, honoraires de médecin, etc. – Pertes de gains professionnels actuels: C’est la perte de revenus subie durant la période d’incapacité temporaire

Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation) :

  • penses de santé futures : Ce sont les frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques qui sont nécessaires après la consolidation de l’état de santé de la victime. Exemple : prothèses.
  • Frais de logement adapté : Ces frais correspondent à l’aménagement du domicile afin de s’adapter au handicap de la victime.
  • Frais de véhicule adapté : Ces frais correspondent à l’adaptation du véhicule au handicap de la victime.
  • Assistance par tierce personne : C’est l’indemnisation des besoins en tierce personne.
  • Incidence professionnelle : Ce sont les séquelles qui limitent les possibilités professionnelles ou rendent l’activité professionnelle antérieure plus fatigante et pénible. Pour évaluer ce préjudice il faut tenir compte de la nature de et l’ampleur de l’incidence. L’indemnisation est sous forme de capital.
  • Pertes de gains professionnels futurs : C’est la perte ou la diminution des revenus consécutive à l’incapacité permanente à compte de la date de consolidation. Le juge devra déterminer la perte annuelle, déterminer la PGPF passée et déterminer la PGPF future.- Incidence professionnelle.
  • Préjudice scolaire, universitaire ou de formation: Il peut s’agir de la perte d’années d’études, d’un retard scolaire ou de formation, de la modification de l’orientation professionnelle, etc.

Ce préjudice s’apprécie in concreto en fonction de la durée de l’ITT, des résultats scolaire avant l’accident, du niveau des études poursuivies, de la chance de terminer sa formation.

2> Préjudices extra-patrimoniaux

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :

  • Déficit fonctionnel temporaire: C’est l’indemnisation de la perte de la qualité de vie des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le préjudice temporaire d’agrément. Selon que la victime est plus ou moins handicapée : de 600 à 900 euros par mois.
  • Souffrances endurées par la victime. Le pretium doloris comprend les soins, la durée d’hospitalisation, les interventions chirurgicales, etc.

Ce préjudice est calculé selon un barème allant de 1 à 7 avec des indemnités allant de 0€ à plus de plus de 80 000€.

  • Préjudice esthétique temporaire

Durant la maladie traumatique, la victime a subi des souffrances physiques.

Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation) :

  • Déficit fonctionnel permanent: C’est l’indemnisation de la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel, ou intellectuel résultant de l’accident. Ce taux est évalué par l’expert.  Cette indemnité est calculée en la multipliant par le taux du déficit fonctionnel par une valeur du point. La valeur du point est elle-même fonction du taux retenu par l’expert et de l’âge de la victime à la consolidation.
  • Préjudice d’agrément: C’est la privation des plaisirs normaux de la vie telle une activité sportive.
  • Préjudice esthétique permanent : C’est la modification physique de la victime suite à l’accident. Ce peut être des cicatrices, des déformations, etc. Ce préjudice est calculé selon un barème allant de 1 à 7.
  • Préjudice sexuel : Il est décomposé en 3 préjudices: Préjudice morphologique /Préjudice lié à l’acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l’accomplissement de l’acte sexuel. / Préjudice lié à une impossibilité ou une difficulté à procréer. L’indemnisation peut aller jusqu’à 50 000 euros si le préjudice affecte les 3 aspects.
  • Préjudice d’établissement : Perte d’espoir, de chance ou de toute possibilité de réaliser un projet de vie familiale “normale” en raison du handicap dont reste atteint la victime après sa consolidation.
  • Préjudices permanents exceptionnels

Préjudices extra-patrimoniaux évolutifs (hors consolidation) :

  • Préjudices liés à des pathologies évolutives

Quels sont les préjudices indemnisés pour LES VICTIMES INDIRECTES ?

Il faut distinguer suivant que la victime directe est vivante ou non.

  • Préjudices indemnisés EN CAS DE DÉCÈS DE LA VICTIME DIRECTE ?

  • Préjudices patrimoniaux
  • Frais d’obsèques (F.O.)
  • Pertes de revenus des proches (P.R.)
  • Frais divers des proches
  • Préjudices extra-patrimoniaux
  • Préjudice d’accompagnement
  • Préjudice d’affection Ce préjudice découle du préjudice d’agrément subi par la victime. Les proches subissent de ce fait une modification importante des conditions de vie ainsi que de leurs rapports avec la victime.
  • Préjudices indemnisés EN CAS DE SURVIE DE LA VICTIME DIRECTE ?
  • Préjudices patrimoniaux

– Pertes de revenus des proches (P.R.)

Frais divers des proches (F.D.)

  • Préjudices extra-patrimoniaux

– Préjudice d’affection (P.AF.)
– Préjudices extra-patrimoniaux exceptionnels (P.EX.)

Si les sommes proposées par les compagnies d’assurances ne sont pas satisfaisantes ou si le responsable n’était pas assuré, il faudra avoir recours à des procédures judiciaires, faire appel au FGAO Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de dommages et autres démarches qui feront l’objet de développements ultérieurs

 

Bien cordialement

Carol FERRE-DARRICAU FERRE AVOCATS ASSOCIES 4 rue d’Enghien 33000 BORDEAUX    15 Avenue de la Libération 33380 MIOS 34 Place de la Prévôté 33670 CREON      TEL0556562222 / Site ferreavocats.com

 

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